Dans les litiges entre les demandeurs d’emploi et POLE EMPLOI, après une tentative de résolution amiable, il est possible de saisir une institution singulière, le Médiateur de POLE EMPLOI, présent dans chacune des directions régionales de POLE EMPLOI.
Le décret n°2022-433 du 25 mars 2022[i] a introduit des règles d’obligation de saisine préalable du Médiateur de POLE EMPLOI avant de saisir un tribunal. Ce recours au Médiateur de POLE EMPLOI est-il toujours obligatoire ?
Pour répondre à la question, il est nécessaire de rappeler sommairement comment se détermine la compétence matérielle entre juge judiciaire et juge administratif dans les litiges avec POLE EMPLOI (I).
Dans le cas où le juge compétent est le juge administratif, la saisine du Médiateur de POLE EMPLOI est une obligation sanctionnée par une irrecevabilité, mais les textes restent perfectibles (II).
Dans le cas où le juge compétent est le juge civil, la saisine du Médiateur de POLE EMPLOI n’est pas une obligation. (III)
I La compétence matérielle entre juge judiciaire et juge administratif dans les litiges avec POLE EMPLOI
Le juge judiciaire est compétent chaque fois que le litige avec POLE EMPLOI concerne le paiement ou le refus de paiement d’une prestation assurantielle, principalement l’Allocation de Retour à l’Emploi (ARE), ou une demande de restitution d’ARE par POLE EMPLOI.
L’article L. 5312-12 du code du travail (L. no 2008-126 du 13 févr. 2008) dispose que les litiges relatifs aux prestations dont le service est assuré par l’institution, pour le compte de l’organisme chargé de la gestion du régime d’assurance chômage ou de l’État sont soumis au régime contentieux qui leur était applicable antérieurement à la création de cette institution.
Le gel de la compétence contentieuse, sous l’autorité du tribunal des conflits, a créé deux blocs de compétence :
- tout ce qui relève des prestations de solidarité (Allocation spécifique de Solidarité ASS), de la formation, de la gestion des listes de demandeurs d’emploi (inscription, radiation), des sanctions prises par POLE EMPLOI agissant comme gestionnaire du service public de l’emploi, pour le compte de l’Etat, relève du tribunal administratif.
- tout ce qui concerne le calcul des prestations servies par l’assurance chômage (ARE), comme le refus, le trop-perçu, la contestation du montant ou de la durée d’indemnisation, relève du tribunal judiciaire (procédure orale pour les litiges de moins de 10.000 euros, chambre civile de droit commun, procédure écrite avec représentation obligatoire pour les autres litiges) ; et au sein du tribunal judicaire, c’est une chambre civile de droit commun, et en aucun cas son POLE SOCIAL (ex-TASS, procédure orale et échevinage); au tribunal judiciaire de PARIS, l’appellation retenue pour désigner la chambre civile compétente est le « ¼ SOCIAL ».
II La saisine du Médiateur de POLE EMPLOI est obligatoire dans le cadre d’un recours devant le juge administratif
La création de la médiation préalable obligatoire (MPO) dans le contexte de l’assurance chômage a été précédée d’une expérimentation sur trois ans. L’expérimentation portait sur trois directions régionales de POLE EMPLOI : Pays de Loire, Occitanie et Auvergne-Rhône-Alpes.
Cette expérimentation a été l’occasion d’un rapport spécifique[i] du Médiateur de POLE EMPLOI en mai 2022 et d’un bilan final du Conseil d’État sur l’expérimentation de la MPO (23 juin 2021) :
« Des différents champs de l’expérimentation, celui qui a le mieux fonctionné est celui de Pôle emploi, pour les raisons suivantes : Les médiateurs de Pôle emploi sont professionnels, dûment formés, gratuits (mais financés par l’administration), disponibles (employés à temps plein), reconnus comme légitimes par l’administration et les usagers ; Les médiations sont toujours très brèves (30 jours en moyenne), plus rapides qu’un contentieux devant le juge ; Le taux d’accords est particulièrement élevé. Parmi elles, une majorité de médiations dites « pédagogiques », c’est-à-dire des médiations abouties positivement sans modification de la décision de l’administration (jusqu’à 69% des accords obtenus), ce qui encourage aussi l’administration à miser sur la médiation. […] L’expérimentation de la MPO avec Pôle emploi s’est révélée être une grande réussite, tant d’un point de vue quantitatif que qualitatif. Le potentiel de développement de la médiation y est particulièrement important, notamment au regard de l’efficacité, de la légitimité et de la notoriété des médiateurs régionaux et nationaux de Pôle emploi. Il y aurait donc lieu de prévoir une extension de la MPO à l’ensemble des décisions de l’établissement relevant de la juridiction administrative […] »
L’article L213-11 du code de justice administrative (CJA), créé par la LOI n°2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire – art. 27 dispose :
« Les recours formés contre les décisions individuelles qui concernent la situation de personnes physiques et dont la liste est déterminée par décret en Conseil d’Etat sont, à peine d’irrecevabilité, précédés d’une tentative de médiation. Ce décret en Conseil d’Etat précise en outre le médiateur relevant de l’administration chargé d’assurer la médiation. »
Le décret en Conseil d’Etat n°2022-433 du 25 mars 2022 a introduit dans le chapitre II du titre 1er du livre III du code du travail une section 5 composée de deux articles :
Article R5312-47
La procédure de médiation préalable obligatoire prévue par l’article L. 213-11 du code de justice administrative est applicable aux recours contentieux formés contre les décisions individuelles suivantes prises par Pôle emploi et relevant du champ de compétence du juge administratif :
1° Les décisions prises en application des délibérations du conseil d’administration de Pôle emploi mentionnées au 2° de l’article R. 5312-6 [vise rarement des litiges individuels]
2° Les décisions relatives à la cessation d’inscription sur les listes des demandeurs d’emploi ou au changement de catégorie mentionnées à l’article R. 5411-18 ;
3° Les décisions de radiation de la liste des demandeurs d’emploi, prévues aux articles L. 5412-1 et L. 5412-2 ;
4° Les décisions de suppression du revenu de remplacement, prévues à l’article L. 5426-2 ;
5° Les décisions relatives à la pénalité administrative mentionnée à l’article L. 5426-5 ;
6° Les décisions relatives au remboursement des allocations, aides, ainsi que toute autre prestation indument versées mentionnées à l’article L. 5426-8-1 ;
7° Les décisions prises pour le compte de l’Etat relatives :
a) Aux allocations destinées aux jeunes s’engageant dans un parcours contractualisé d’accompagnement vers l’emploi et l’autonomie prévues aux articles L. 5131-5 et L. 5131-6 ;
b) A l’allocation de solidarité spécifique prévue aux articles L. 5423-1 à L. 5423-3 ;
c) Aux allocations de solidarité mentionnées à l’article L. 5424-21 servies aux intermittents du spectacle
d) A l’aide à la création ou à la reprise d’entreprise prévue au II de l’article 136 de la loi n° 96-1181 du 30 décembre 1996 de finances pour 1997.
Conformément à l’article 6 du décret n° 2022-433 du 25 mars 2022, ces dispositions sont applicables aux recours contentieux susceptibles d’être présentés à l’encontre des décisions intervenues à compter du 1er juillet 2022.
Article R5312-48
Le médiateur chargé de la médiation préalable obligatoire mentionnée à l’article R. 5312-47 est le médiateur régional de Pôle emploi territorialement compétent.
Ces textes mentionnent expressément que cette Médiation Préalable Obligatoire (MPO) ne concerne que les litiges « relevant du champ de compétence du juge administratif ».
Sont visés littéralement :
a) les décisions de sanction relatives à la cessation d’inscription sur les listes des demandeurs d’emploi ou au changement de catégorie, les décisions de radiation de la liste des demandeurs d’emploi, les décisions de suppression du revenu de remplacement, les décisions relatives à la pénalité administrative mentionnée.
b) Les autres décisions prises pour le compte de l’Etat relatives aux allocations destinées aux jeunes s’engageant dans un parcours contractualisé d’accompagnement vers l’emploi et l’autonomie, l’allocation de solidarité spécifique, à l’aide à la création ou à la reprise d’entreprise.
c) les décisions concernant un trop-perçu : remboursement des allocations, aides, ainsi que toutes autres prestations indument versées.
A noter que l’article R5312-47 ne vise pas spécifiquement la contrainte et son opposition devant le juge administratif qui relèvent d’une procédure spécifique visée aux articles L.5426-8-2, R.5426-20, R.426-21 et R.5426-22 du code du travail, lesquels n’ont pas été modifiés par le décret MPO précité.
Cet oubli a cependant été corrigé par la jurisprudence administrative qui a relevé qu’une proposition de Médiation devait intervenir avant l’émission de la contrainte. Le rapport[ii] du Médiateur de POLE EMPLOI 2022 indique que le référent MPO du Conseil d’Etat partage cet avis, dès lors que la contrainte est postérieure à la date d’entrée en vigueur, soit le 1er juillet 2022. L’avocat du défendeur à l’opposition devra donc vérifier si un processus de saisine Médiateur a bien eu lieu, au besoin initié par POLE EMPLOI lui-même, proposant une médiation.
Il n’est pas, non plus, fait mention d’une éventuelle action de l’allocataire contestant un refus de prestations de solidarité ou ses modalités et il n’est pas mentionné l’inscription rétroactive sur la liste des demandeurs d’emploi ou le refus d’inscription.
Dans ces circonstances, la prudence sera de considérer que la MPO est également obligatoire en toute circonstance et de saisir préalablement le Médiateur avant de saisir le tribunal administratif.
Le médiateur chargé de la médiation préalable obligatoire est le médiateur régional de Pôle emploi territorialement compétent.
Le décret n°2022-433 du 25 mars 2022 a également modifié le chapitre III du titre Ier du livre II du code de justice administrative (partie réglementaire) en créant une Section 4 Médiation préalable obligatoire :
Article R213-10
La médiation préalable obligatoire est engagée auprès du médiateur compétent dans le délai de recours contentieux prévu à l’article R. 421-1, majoré, le cas échéant, dans les conditions prévues à l’article R. 421-7.
La notification de la décision ou l’accusé de réception prévu à l’article L. 112-3 du code des relations entre le public et l’administration mentionne cette obligation et indique les coordonnées du médiateur compétent. A défaut, le délai de recours contentieux ne court pas à l’encontre de la décision litigieuse.
La lettre de saisine du médiateur est accompagnée de la décision contestée ou, lorsque celle-ci est implicite, d’une copie de la demande et de l’accusé de réception ayant fait naître cette décision.
Article R213-11
La saisine du médiateur compétent interrompt le délai de recours contentieux et suspend les délais de prescription dans les conditions prévues à l’article L. 213-13.
La réclamation auprès du Défenseur des droits, lorsqu’elle est faite dans les conditions prévues à l’article L. 213-14, produit les mêmes effets.
Article R213-12
Lorsqu’un tribunal administratif est saisi dans le délai de recours contentieux d’une requête n’ayant pas été précédée d’une médiation qui était obligatoire, son président ou le magistrat qu’il délègue, rejette cette requête par ordonnance et transmet le dossier au médiateur compétent.
Le médiateur est supposé avoir été saisi à la date d’enregistrement de la requête.
Article R213-13
L’exercice d’un recours gracieux ou hiérarchique après la médiation n’interrompt pas de nouveau le délai de recours.
Le décret précité a également modifié le chapitre III du titre Ier du livre II du code de justice administrative (partie réglementaire) en complétant la section 1 « Dispositions générales » par un article R. 213-3-1 « Les parties peuvent être assistées devant le médiateur par toute personne de leur choix. »
La médiation préalable obligatoire est engagée auprès du médiateur compétent, le cas échéant avec l’assistance d’un avocat ou de toute autre personne.
Ce n’est pas mentionné, mais la saisine d’un médiateur incompétent territorialement ne sera probablement pas sanctionnée, car la pratique et les textes de la justice administrative sont assez souples pour considérer que cette erreur doit être rectifiée par le destinataire. Tout comme un tribunal administratif non compétent territorialement renvoie vers le tribunal compétent, sans préjudice pour le requérant, le médiateur non compétent devant simplement transmettre la saisine à son collègue compétent. Mais cela ne dispense pas l’avocat en charge du dossier d’éviter cette erreur de transmission, source de délais inutiles.
La saisine du Médiateur de POLE EMPLOI doit intervenir dans le délai de recours contentieux de deux mois dans le cas standard, majoré de deux mois en cas de résidence à l’étranger, d’un mois en cas de résidence en métropole alors que le tribunal administratif compétent est celui Guadeloupe, de Martinique, de Guyane, de La Réunion, de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin, de Mayotte, de Saint-Pierre-et-Miquelon, de la Polynésie française ou de Wallis-et-Futuna. Dans le cas de la Nouvelle-Calédonie, il ne peut y avoir lieu à litige avec POLE EMPLOI, le régime d’assurance chômage étant spécifique et non couvert par les règles nationales.
La notification de la décision contestée doit comprendre le rappel de l’obligation de saisine préalable, et les coordonnées du médiateur compétent. A défaut, le délai de recours contentieux ne court pas à l’encontre de la décision litigieuse.
A noter que l’article L5312-12-1 du code du travail créant l’institution de Médiateur précise que « Les réclamations [auprès du Médiateur] doivent avoir été précédées de démarches auprès des services concernés. », soit l’obligation de former, avant de saisir le Médiateur, un recours gracieux ou hiérarchique.
Alors que l’article L412-4 du Code des relations entre le public et l’administration précise dans son Chapitre II : Recours administratifs préalables obligatoires à l’article L412-4 que « La présentation d’un recours gracieux ou hiérarchique ne conserve pas le délai imparti pour exercer le recours administratif préalable obligatoire non plus que le délai de recours contentieux ».
La mise en œuvre de ces deux textes de même niveau législatif présente une difficulté : le demandeur d’emploi doit, dans le délai du recours contentieux, former un recours auprès de l’agence (ou la direction régionale) pour avoir accès au Médiateur. Mais aucun texte ne fixe un délai pour répondre au recours, sinon le délai implicite de deux mois qui vaut rejet. Or attendre ce délai de rejet implicite fait courir le risque d’être hors délai pour saisir le Médiateur, cette saisine étant seule à même d’interrompre le délai de recours contentieux.
Le Médiateur de POLE EMPLOI indique dans son rapport de 2022 que la MPO « a nécessité la modification de nombreux courriers de notification des décisions, afin de les adapter à la temporalité du nouveau processus : réclamation en agence / demande de médiation auprès du médiateur régional /requête devant le tribunal administratif. Un important travail a été mené pour délivrer une information facilement compréhensible. Cet objectif a été atteint pour tous les courriers sauf un : celui qui concerne les radiations de la liste des demandeurs d’emploi »
De fait, dans ce courrier type[iii] où POLE EMPLOI notifie une radiation et une suppression définitive du revenu de remplacement, il est indiqué la date de fin de délai du recours contentieux (2 mois) tout en expliquant à l’intéressé qu’il peut, dans ce délai contester la décision en respectant les étapes 1 et 2, l’étape 1 étant de déposer « une réclamation auprès de POLE EMPLOI » sans préciser que cette réclamation n’interrompt pas le délai de recours contentieux et dans le même délai, procéder à l’étape 2 avec une saisine du Médiateur de POLE EMPLOI.
Ces informations ne sont pas conformes aux textes et peuvent induire le destinataire en erreur, puisque celui-ci, peut comprendre qu’il peut former un recours gracieux, attendre les deux mois générant un rejet implicite avant de saisir le Médiateur et… se retrouver au-delà du délai de recours contentieux.
La saisine du Médiateur compétent doit comprendre la copie de la décision contestée ou, lorsque celle-ci est implicite, d’une copie de la demande et de l’accusé de réception ayant fait naître cette décision.
L’article L213-13 du CJA dispose que « La saisine du médiateur compétent interrompt le délai de recours contentieux et suspend les délais de prescription, qui recommencent à courir à compter de la date à laquelle soit l’une des parties, soit les deux, soit le médiateur déclarent, de façon non équivoque et par tout moyen permettant d’en attester la connaissance par l’ensemble des parties, que la médiation est terminée. »
La sanction de l’absence de saisine du Médiateur est une irrecevabilité que doit prononcer le tribunal administratif ; cette irrecevabilité a pour conséquence le renvoi du dossier par le tribunal vers le Médiateur compétent, considéré comme ayant été saisi au jour de la requête.
Cette « irrecevabilité » n’est donc pas un couperet absolu, puisque l’ordonnance de rejet vise à saisir le Médiateur de POLE EMPLOI. Celui-ci devra alors provoquer une demande d’explications et d’arguments du requérant et de POLE EMPLOI. La fin de la médiation, permettra de reprendre le cours de la requête.
L’avocat en charge du dossier évitera de se trouver dans cette situation périlleuse. En effet si le tribunal a été saisi à une date très proche de l’expiration du délai de recours contentieux, la fin de médiation supposera de réagir dans le délai restant, qui peut être très bref. Sauf à compter sur une éventuelle mansuétude de la jurisprudence administrative, considérant la fin de médiation comme une simple régularisation du dossier qui reprendra son cours.
III La saisine du Médiateur de POLE EMPLOI n’est pas obligatoire dans le cadre d’un recours devant le juge judiciaire
Devant la juridiction civile, le cas spécifique de POLE EMPLOI n’est pas évoqué, il faut se référer au droit commun, l’article 750-1 du code de procédure civile dans sa version en vigueur depuis le 13 mai 2023, suite la modification par le décret n°2023-357 du 11 mai 2023 – art. 1.
En application de l’article 4 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016, à peine d’irrecevabilité que le juge peut prononcer d’office, la demande en justice est précédée, au choix des parties, d’une tentative de conciliation menée par un conciliateur de justice, d’une tentative de médiation ou d’une tentative de procédure participative, lorsqu’elle tend au paiement d’une somme n’excédant pas 5 000 euros ou lorsqu’elle est relative à l’une des actions mentionnées aux articles R. 211-3-4 et R. 211-3-8 du code de l’organisation judiciaire ou à un trouble anormal de voisinage.
Les parties sont dispensées de l’obligation mentionnée au premier alinéa dans les cas suivants :
1° Si l’une des parties au moins sollicite l’homologation d’un accord ;
2° Lorsque l’exercice d’un recours préalable est imposé auprès de l’auteur de la décision ;
3° Si l’absence de recours à l’un des modes de résolution amiable mentionnés au premier alinéa est justifiée par un motif légitime tenant soit à l’urgence manifeste, soit aux circonstances de l’espèce rendant impossible une telle tentative ou nécessitant qu’une décision soit rendue non contradictoirement, soit à l’indisponibilité de conciliateurs de justice entraînant l’organisation de la première réunion de conciliation dans un délai supérieur à trois mois à compter de la saisine d’un conciliateur ; le demandeur justifie par tout moyen de la saisine et de ses suites ;
4° Si le juge ou l’autorité administrative doit, en application d’une disposition particulière, procéder à une tentative préalable de conciliation ;
5° Si le créancier a vainement engagé une procédure simplifiée de recouvrement des petites créances, conformément à l’article L. 125-1 du code des procédures civiles d’exécution.
Le Médiateur de POLE EMPLOI n’est pas un conciliateur de justice, mais le texte envisage une « tentative de médiation » sans viser avec précision les modalités.
Si la demande de prestations ARE est de moins de 5.000 euros, une demande de dommages et intérêts portant la totalité de la somme demandée à plus de 5.000 euros permet cependant de contourner cette obligation.
En défense, si la contrainte émise par POLE EMPLOI pour trop-perçu est de moins de 5.000 euros, il peut être présenté, en sus d’autres moyens de défense, et comme moyen d’irrecevabilité, que POLE EMPLOI aurait dû, avant l’émission de la contrainte, procéder à l’une des tentatives visées à l’article précité. En effet, l’émetteur de la contrainte est considéré comme le demandeur en procédure selon une jurisprudence constante de la Cour de cassation.
Il faut revenir ici sur le décret n° 2022-433 du 25 mars 2022 relatif à la procédure de médiation préalable obligatoire qui a précisé l’article R5426-19 du code du travail.
Article R5426-19 du code du travail dans sa rédaction issue du décret précité.
« Le débiteur qui conteste le caractère indu des prestations mentionnées aux articles L. 5422-1 [Allocation de Retour à l’Emploi] et L. 5424-25 [Allocation des indépendants] qui lui sont réclamées forme un recours gracieux préalable devant le directeur général de Pôle emploi dans un délai de deux mois à compter de la date de notification de l’indu par Pôle emploi.
Conformément aux dispositions de l’article L. 411-7 du code des relations entre le public et l’administration, lorsque la décision du directeur général de Pôle emploi sur ce recours gracieux n’a pas été portée à la connaissance du requérant dans le délai de deux mois, l’intéressé peut considérer sa contestation comme rejetée. Il peut alors, s’il le souhaite, se pourvoir devant le juge compétent (…) ».
La précision apportée par le décret précité vise des prestations assurantielles, Allocation de Retour à l’Emploi et Allocation des indépendants, entrant dans le champ de compétence du juge civil.
Ce texte oblige à un recours gracieux préalable devant le directeur général de POLE EMPLOI avant de « se pourvoir devant le juge compétent » ; le « juge compétent » étant le juge judiciaire compte tenu des litiges visés dans le texte.
A noter que ce recours gracieux préalable doit être fait auprès du directeur général de POLE EMPLOI et non du Médiateur de POLE EMPLOI, qui peut être également saisi en cas de maintien de la décision. Ce recours préalable oblige POLE EMPLOI à émettre une nouvelle décision, indiquant, le cas échéant, les motifs du rejet du recours.
En pratique, il est plus simple pour l’allocataire visé par une demande de restitution qu’il conteste, d’attendre que POLE EMPLOI émette une contrainte qui pourra donner lieu à opposition, le temps passé dans cette attente, pouvant permettre d’invoquer, le cas échéant, la prescription de créance prétendue.
A cet égard, il faut garder en mémoire qu’une saisine du Médiateur de POLE EMPLOI est susceptible d’interrompre la prescription visée à l’article 2238 du code civil :
« La prescription est suspendue à compter du jour où, après la survenance d’un litige, les parties conviennent de recourir à la médiation ou à la conciliation ou, à défaut d’accord écrit, à compter du jour de la première réunion de médiation ou de conciliation. (…)
Le délai de prescription recommence à courir, pour une durée qui ne peut être inférieure à six mois, à compter de la date à laquelle soit l’une des parties ou les deux, soit le médiateur ou le conciliateur déclarent que la médiation ou la conciliation est terminée. (…) ».
Susceptible seulement, il peut être soutenu que le Médiateur de POLE EMPLOI n’est pas une personne et est rémunérée par POLE EMPLOI, partie au procès, alors que le médiateur au sens du code de procédure civile Chapitre II : La médiation. (Articles 131-1 à 131-15) doit être une personne morale ou physique, rémunérée par les parties…
Quoi qu’il en soit, la saisine du Médiateur de POLE EMPLOI est surtout utile dans le cas où le dossier révèle une erreur grossière de POLE EMPLOI et peut favoriser une résolution rapide du litige.
Pour être complet, il faut mentionner que le Médiateur national de POLE EMPLOI, dans son rapport 2021, mentionne que les juges judiciaires « ont commencé à se tourner vers les Médiateurs de Pôle emploi au cours de l’année 2021 » en formulant « des demandes de médiation portant sur des décisions prises par les Instances Paritaires Régionales (IPR) ».
Conclusion
L’obligation de saisine du Médiateur de POLE EMPLOI dans le cadre de la médiation préalable obligatoire se limite aux cas qui relèvent du juge administratif (sanctions, allocations de solidarité, formation). Il subsiste une difficulté dans l’articulation entre la saisine du Médiateur dans le délai du recours contentieux, alors que cette saisine doit être précédée d’une réclamation en agence, réclamation, qui en présence d’un MPO, n’interrompt pas le délai contentieux. Et dans le cas d’une radiation et d’une suppression définitive du revenu de remplacement, le courrier type de POLE EMPLOI n’étant pas à ce jour conforme aux textes.
Dans les matières qui relèvent du juge civil, l’obligation se limite à former un recours gracieux préalable devant le directeur général de POLE EMPLOI, en cas de contestation de trop perçu, mais sans que ce soit applicable en cas d’opposition à contrainte. La saisine du Médiateur de POLE EMPLOI reste facultative dans les matières qui relèvent du juge civil (allocations assurantielles comme l’ARE) ; le droit commun oblige néanmoins à une médiation -sans référence au Médiateur de POLE EMPLOI- ou à une conciliation pour les litiges de moins de 5.000 euros en procédure orale sans représentation obligatoire.
[i] https://www.pole-emploi.org/files/live/sites/peorg/files/documents/Publications/Le%20rapport%20sp%C3%A9cifique%20du%20M%C3%A9diateur%20National%20de%20P%C3%B4le%20emploi%2C%20M%C3%A9diation%20Pr%C3%A9alable%20Obligatoire%20(MPO)%20de%20l’exp%C3%A9rimentation%20%C3%A0%20la%20p%C3%A9rennisation.pdf
[ii] https://www.pole-emploi.org/files/live/sites/peorg/files/documents/Publications/Le%20rapport%202022%20du%20M%C3%A9diateur%20national%20de%20P%C3%B4le%20emploi.pdf
[iii] Encore utilisé au jour de rédaction de l’article